23 avril 2023 3e Dimanche de Pâques, année A – Luc 24, 13-35
L’évangile de ce jour nous est bien connu ; c’est vraiment un chef d’œuvre de récit des apparitions du Ressuscité. On y voit la pédagogie de la foi, la lente maturation qui finit par adhérer au mystère que nous venons de célébrer à Pâques. Nous pouvons nous reconnaître dans ces deux individus sur le chemin : nos moments de doute, de questionnement, mais aussi nos quelques rares jours où tout semble plus clair, limpide. La Parole proclamée et le Pain partagé : voilà la nourriture de base de notre aventure spirituelle. Nous ne sommes pas si différents des disciples d’Emmaüs. Mais que veut nous dire ce texte ?
L’évangéliste Luc ne rapporte que deux apparitions du Ressuscité, celle-ci puis la suite lorsque Jésus se présente à tous les frères réunis. Luc fait aussi allusion sans la décrire à une rencontre plus personnelle avec Simon-Pierre. Comme dans les autres récits évangéliques, il y a un mélange de doute et de joie. Lorsque Jésus est visible, il n’est pas reconnu ; lorsqu’il est reconnu, il n’est plus visible à leurs yeux. C’est que le corps du Ressuscité a changé d’apparence mais non pas d’identité. Les contingences physiques n’ont plus de prises sur lui. Il dira plus tard : ‘Donnez-moi à manger.’ Il y a de quoi ne plus savoir où donner de la tête.
Pourtant nous savons qu’avec la Pentecôte l’Esprit de Dieu va transformer ces hommes peureux en apôtres convaincus de leur mission, celle d’annoncer que Jésus est vivant et qu’il n’abandonnera jamais les croyants, quelque soient les situations. Ces témoins sont investis d’une force qu’ils ne soupçonnaient pas, d’un courage et d’une audace qui se communiqueront autour d’eux. Leur prédication va engendrer des disciples en grand nombre. De quoi ébranler l’autorité des grands prêtres et mettre tout Jérusalem sans dessus dessous. Sentons-nous bien cette effervescence ?
2000 ans plus tard, riche d’une tradition qui n’est pas sans péripéties, cette foi en la Résurrection est venue jusqu’à nous. Depuis notre baptême, nous avons la responsabilité non seulement d’en vivre intensément mais de la communiquer autour de nous. Bien sûr, nous ne sommes plus en chrétienté, ce monde de religion d’état. Notre Québec aux racines profondément chrétiennes vit maintenant de la laïcité, comme Mr. Legault se l’est fait rappeler ces derniers temps. Plusieurs de nos concitoyens ont perdu toute référence religieuse. L’incroyance a même gagné de nos proches. Nous sommes parfois gênés d’afficher ouvertement nos convictions profondes. On nous défendra même de parler d’évangile aux petits-enfants et cela nous attriste.
Heureusement, il y a l’Esprit Saint. Il est capable, comme pour les apôtres, de changer nos peurs, nos doutes, en paroles d’espérance, en gestes de solidarité, en charité inventive. Nous ne sommes pas désabusés mais peut-être un peu frileux. Il nous faut plonger à fond dans la joie et la paix de Pâques et nous porterons le feu qui nous habite à ceux et celles dont les cendres se sont refroidies. Jésus ressuscité, nous ne l’avons pas vu, nous n’avons pas mangé avec lui, nous n’avons pas mis notre main dans son côté ouvert. Pourtant, comme pour les disciples d’Emmaüs, à chaque dimanche il nous partage la Parole et rompt pour nous le Pain de sa présence. Puissions-nous en vivre passionnément.
Père Gilles Blouin, assomptionniste
JÉSUS-CHRIST, LE PAIN D’HUMANITÉ ET LE VIN DE LIBERTÉ