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« Restez éveillés et priez en tout temps… »

Image libérée de droits d’auteur sous Creative Commons CC0 || https://pxhere.com/fr/photo/1207555

28 novembre 2021      1er dimanche de l’Avent, année C – Luc 21, 25-28.34-36
Lectures de ce jour

Nous avons entendu trois lectures de tonalités bien différentes, mais qui nous préparent à entrer dans l’Avent avec réalisme et confiance. Jérémie parle de bonheur alors qu’Israël vit dans un climat de panique. Paul s’adresse à une communauté qui baigne dans un climat d’euphorie et attend avec impatience le retour du Christ, i.e. la fin du monde. Et Jésus, prédisant des cataclysmes, invite à la persévérance et la confiance.

Jérémie – (panique)

Jérémie n’a cessé de rappeler à son peuple ses infidélités à l’Alliance et dénoncé avec force son manque de confiance dans la Parole du Seigneur en particulier dans les circonstances difficiles. Ces discours déplaisaient aux dirigeants qui l’ont jeté en prison.

Devant la panique qui s’est emparé de la population, le prophète change de ton et rappelle une promesse du Seigneur. « Voici venir des jours – oracle du Seigneur – où j’accomplirai la parole de bonheur que j’ai adressée à la maison d’Israël et à la maison de Juda. »

Au moment où Jérémie relaie cette promesse, la situation d’Israël est désespérée. En effet, les armées de Nabuchodonosor encerclent Jérusalem et se préparent à l’assaut final. Jérémie, sur l’ordre du Seigneur, invite les autorités à se rendre pour éviter le massacre et la déportation d’une partie de la population.

Nous connaissons la suite. Les autorités refusent d’entendre Jérémie et tentent la fuite en Égypte : Nabuchodonosor s’empare de la ville et détruit le temple. Une partie de la population est tuée ou emmenée en exil. Jérémie, prisonnier, est emmené avec les fuyards et il serait mort en cours de route ou en exil en Égypte.

En évoquant à ce moment troublé une promesse de bonheur de la part du Seigneur, le prophète révèle aux siens que le Seigneur sera toujours là. C’est en exil que le peuple en fait la découverte. Privé de ses institutions, les sacrifices et le temple, Israël n’a plus qu’un refuge, la Parole du Seigneur. Ce qu’il estimait essentiel à sa vie n’est plus et pourtant le Seigneur demeure avec les exilés et les rescapés.

Nous traversons une période qui n’a rien de commun avec la Jérusalem menacée de destruction. Mais nos communautés chrétiennes voient fondre leurs ressources et disparaître plusieurs lieux de culte. De plus, l’avenir de toute notre société s’est assombri. Le nouveau variant du Convid19, nommé « omicron », plus virulent et plus facilement transmissible que les précédents sème l’inquiétude à un moment où l’on pensait que par la vaccination on allait finalement s’en sortir.

Dans un contexte qui met à mal notre espérance, la Parole de Dieu nous est plus que jamais nécessaire. Dans ces moments-là promesse de bonheur resurgit. « Voici venir des jours – oracle du Seigneur – où j’accomplirai la parole de bonheur que j’ai adressée à la maison d’Israël et à la maison de Juda. »

Comment interpréter cette promesse de bonheur ? Les élections, — et nous venons d’en vivre une, — sont toujours précédées d’une litanie de promesses. Qui sont parfois tenues. Dieu, lui, a-t-il tenu promesse ? Jérémie ajoute : « En ces jours-là, en ce temps-là, je ferai naître chez David un Germe de justice, et il exercera dans le pays le droit et la justice… »

Dieu a-t-il tenu promesse ? A-t-il fait naître un tel descendant à David ? Quelqu’un qui aurait exercé le droit et la justice ? Dieu a promis. Jésus est venu. Les voies de Dieu ne sont pas les nôtres. Le prophète Isaïe l’avait rappelé : « C’est que vos pensées ne sont pas mes pensées et mes chemins ne sont pas vos chemins – oracle du SEIGNEUR. C’est que les cieux sont hauts, par rapport à la terre: ainsi mes chemins sont hauts, par rapport à vos chemins, et mes pensées, par rapport à vos pensées. » Is 55: 8-9 Tob

Beaucoup plus tard, Jésus est venu. Il a exercé le droit et la justice, mais non à la manière d’un roi ou d’un homme politique, appuyé par une police et une armée, secondé par une légion de fonctionnaires. Il a fait justice en prenant le parti des pauvres, des malades et des pécheurs.

Il a fait beaucoup mieux. Il a tracé la voie du bonheur en nous livrant, entre autres, les béatitudes. Une voie à la portée de toute personne, qu’elle soit ou non en autorité, riche ou pauvre, instruite ou sans instruction. Car le bonheur ne réside pas dans les choses extérieures. De l’extérieur, on peut tout au plus, créer de bonne conditions pour rendre les gens heureux. Cela ne suffit pas. Nous connaissons des personnes qui ont tout, matériellement, physiquement et socialement, et qui sont malheureuses.

Le bonheur ne vient pas de l’extérieur. Il se niche dans le cœur de la personne. La voie du bonheur passe par le cœur. Il entre en nous par les liens que nous tissons avec nos semblables et avec Dieu. On trouve le bonheur en préparant celui des autres.

Jésus et la fin des temps (persévérance)

Jésus évoque la fin des temps avec les images traditionnelles. « Les puissances des cieux seront ébranlées. » Et les hommes « mourront de peur ». Les cataclysmes qui ravagent notre monde ne sont pas nouveaux : ils rappellent que nous vivons dans un univers limité, destiné à disparaître.

Jésus parle de son retour, i.e. du retour glorieux du Fils de l’homme à la « fin des temps », en précisant « Il faut que cela arrive d’abord, mais ce ne sera pas aussitôt la fin. » Lc 21, 9-11 Tob

« Ce ne sera pas aussitôt la fin ». Les faits terrifiants évoqués par Jésus marquent régulièrement l’histoire humaine. Jésus les interprète comme autant de signes d’un univers « fini », limité. Toute catastrophe, comme les inondations qui affligent la région de Vancouver ces jours-ci ne sont que le signe de cet univers qui passe.

Devant ces situations ou d’autres semblables, deux écueils nous guettent : la peur ou l’insouciance. Jésus nous rassure : « ne soyez pas effrayés ». Car les faits énumérés et menaçants anticipent et annoncent un monde nouveau. De là, son invitation pressante : « Restez éveillés et priez en tout temps : ainsi vous aurez la force d’échapper à tout ce qui doit arriver, et vous tenir debout devant le Fils de l’homme. »

Il nous faut donc évacuer la peur. Nous n’attendons pas la destruction du monde, mais sa transformation. Une transformation que nous devons entreprendre maintenant, en sachant que c’est la venue du Christ qui opérera la transformation définitive.

Vécue dans la peur, l’attente paralyse ou encore nous amène à fuir dans le “divertissement” : s’étourdir pour ne pas avoir à penser. Ou encore se laisser absorber par les occupations et les soucis, sans autre horizon que l’immédiat.

Il nous est difficile d’imaginer la fin d’un monde que nous aimons. À moins que nous le concevions comme une transformation libératrice, comme un passage, comme un enfantement.

Paul et les Thessaloniciens (euphorie)

La lettre de St Paul aux Thessaloniciens, le texte le plus ancien du Nouveau Testament, a été écrite probablement en l’an 50 de notre ère. Paul fait face à une situation diamétralement opposée à celle de Jérémie. Non dans le sens où tout va pour le mieux, mais dans l’attitude de cette communauté chrétienne. Tous attendent avec hâte, avec fébrilité, la manifestation glorieuse du retour du Christ. On la croit imminente au point que certains fidèles cessent de travailler, jugeant inutile de bâtir ce qui demain disparaîtra.

Paul dénonce cette attitude. Comme eux, il attend lui aussi avec impatience le retour du Christ. Mais il leur enseigne que le plus important n’est pas de connaître la date du retour du Christ, mais d’agir selon sa Parole. Quelle que soit la date, nous devons remplir nos jours selon le message de Jésus, qui est un message d’amour. Paul exhorte les Thessaloniciens à poursuivre leurs efforts. « Faites de nouveaux progrès. »

De nouveaux progrès dans l’amour. Nous avons le cœur extensible. Facilement, nous le rapetissons en érigeant des barrières protectrices. Nous pouvons aussi l’élargir, sans limite. Dieu nous a créés à son image, lui qui est amour et l’amour infini. Aimer plus. Aimer mieux. Aimer sans exclusion. Voilà l’horizon de nos progrès.

Les Chrétiens de Thessalonique, des femmes et des hommes comme nous, adoptaient déjà l’amour du prochain comme mode de vie. Imparfaitement, sans doute, comme nous. Paul ajoute que cet amour doit s’étendre à tous les humains, sans aucune discrimination. Le défi devait leur paraître énorme, car la persécution sévissait contre les Chrétiens. Son invitation n’en a que plus de force. Aimer même lorsque l’on aurait des raisons de haïr.

Le fait que notre monde passera, que l’univers qui nous porte pourrait se désagréger, n’annule pas notre vocation de le transformer, notre responsabilité de le rendre toujours plus digne de Dieu, plus digne de ce que nous sommes, des images de Dieu.

Conclusion

Notre joie ne se nourrit pas des informations que transmettent les médias; elle s’abreuve à la promesse de Dieu de nous prendre un jour avec lui, de nous faire échapper aux vicissitudes de l’existence. Pour autant, ne fermons pas les yeux sur les souffrances du monde. Elles doivent meubler notre prière et inspirer notre action. Surtout, elles ne doivent pas étouffer notre espérance et justifier notre désengagement.

« Restez éveillés et priez en tout temps. »

La consigne de Jésus demeure essentielle. Pour avancer sereinement dans ce monde en évolution nous devons maintenir le contact avec notre Créateur, i.e. prier. C’est ce contact qui nous permet de regarder toutes choses dans la perspective de la transformation finale, de la rencontre ultime avec Celui qui ne désire que notre bonheur.

En ce début d’année liturgique, en ce temps d’Avent, relevons la tête. Nous le savons, les forces du mal, les puissances destructrices naturelles ou provoquées par les hommes, ne sont que passagères et un monde meilleur pointe à l’horizon.

Forts de cette bonne nouvelle, gardons le sourire et communiquons notre joie. AMEN.

Marcel Poirier, assomptionniste