Dans nos milieux croyants, actuellement, se vit une question latente, presque toujours discrète, et pourtant perturbante et dotée de force : Comment parler de notre foi aux jeunes?
J’avoue ma surprise causée par cette formulation : parler de notre foi. Je m’attendrais à un autre genre de question: Comment partager notre foi? Comment vivre notre foi pour que les jeunes y adhèrent? Comment transmettre notre foi? Mais pas seulement : Comment parler de notre foi!!! Il est vrai que la foi c’est la parole dans toutes ses dimensions : la pensée, la verbalisation, le discernement, l’action. Je pense que, trop souvent, cette réalité est réduite à la verbalisation, pour ne pas dire parler de tout et de rien.
Mais, puisque cette question est ainsi posée: Comment parler de notre foi?, il s’agirait de commencer par en parler … Reconnaissons-le, dans nos sociétés sécularisées, parler de notre foi est presqu’interdit. Régulièrement, il faut entreprendre notre partage par : « Excusez-moi, je ne veux gêner personne, mais je suis croyant/croyante ! » La verbalisation de la foi est difficile, souvent réduite au mutisme, à une sorte d’exil de nos propres paroles. Si, au moins, on ose évoquer la quête spirituelle ou l’approfondissement de notre spiritualité et de notre intériorité, le vocable LA FOI est exilé, banni de presque toutes nos conversations.
Il faudrait un jour bien y penser! Et si on prenait le risque? Avant de le faire pour, précisément le faire, une démarche préalable s’impose : se recueillir et se demander ce qui constitue les épaisseurs de ma foi, les épaisseurs périphériques et celles qui s’avèrent essentielles. Puis, il faut parler d’une manière existentielle, par toute notre vie, et non seulement de parler verbalement.
Rappelons-nous du sens littéral du mot CROIRE (avoir la foi). C’est de faire confiance ou être fidèle. Pour parler verbalement de la foi, il s’agit de bien regarder, avec sincérité, les zones de notre vie où nous faisons confiance, et aussi à qui et à quoi nous sommes fidèles. En observant nos sociétés, et même nos attitudes personnelles, nous pouvons remarquer nos imperfections en ce domaine. Nos vies sont souvent habitées par les soupçons et la méfiance, nos allégeances bougent, tout peut être négocié et renégocié, ce qui débouche parfois par du mutisme, lequel se résume en une phrase : Tu as ton opinion et moi la mienne. La discussion s’arrête là.
Faut-il se décourager? Eh non!!! Nous sommes créés pour le dialogue, pour les échanges et les conversations sous toutes les formes. Cela ne signifie pas de mettre l’autre À GENOUX et de le prosterner devant notre opinion, mais de se stimuler réciproquement dans les échanges de l’âme, de notre être supérieur, pour grandir, comme le dit l’Écriture : « … jusqu’à la pleine stature du Christ » qui est la révélation de la plénitude de notre humanité.
Parler, mais véritablement parler de notre foi. Cela n’a aucune prétention individualiste qui veut imposer sa vision du monde sur tout le monde. Le but est de partager nos expériences de vie dans toutes ses richesses afin de discerner ce qui bon, vrai et beau pour grandir tous ensemble, en incluant Dieu qui nous aime.
Ce temps de Carême nous est offert pour toutes nos conversions et toutes nos conversations.
Bonne semaine à toutes et à tous!
Édouard Shatov, Éditorialiste au Montmartre à Québec
Retraite du Sacré-Cœur: Homélie du cardinal Lacroix