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ON SE RATTRAPE…

Cette semaine on rajoute une journée à notre année dite bissextile pour compenser sur la vitesse de rotation de la terre, comme à chaque quatre ans.

Cela donne à penser.

Saint-Augustin disait : « Qu’est-ce que le temps ? Si personne ne me le demande je le sais. Si quelqu’un pose la question et que je veuille l’expliquer je ne le sais plus ».

Chacun vit son expérience singulière en ayant un rapport unique face à son passé et son présent qui teinteront inévitablement sa perspective et son abord du futur.

Suivant le passé qui n’est déjà plus et l’instant trop souvent fugace, le futur peut être chargé d’anticipation et engendrer le sentiment qu’il se pointe bien trop rapidement.

Car le temps passe vite, de plus en plus, subjectivement en tout cas pour plusieurs. Alors qu’il semble s’étioler à l’enfance et à l’adolescence, il paraît filer à toute allure comme le sable qui glisse entre les doigts.

Une bonne sécurité interne facilite le plein déploiement de la transition vers l’inconnu de nos lendemains en favorisant l’équilibre entre ce qui se perd ou s’engrange dans le passé et peut se gagner dans le futur.

Bien que nous fassions ce que nous avons à faire de plus en plus vite, nous avons souvent l’impression d’avoir de moins en moins de temps.

Un click peut nous transporter au bout du monde mais à une question posée il faut être en mesure de se mobiliser sur- le- champs avec moins de temps pour réfléchir.

Le système social s’organise de telle sorte que le temps est compté pour chaque service à rendre ce qui souvent déshumanise le processus en remplaçant l’écoute par des algorithmes, en exigeant qu’on saisisse immédiatement le numéro à composer pour être dirigé à une réponse automatisée. Se confondent souvent efficacité et efficience si on ne tient compte que de la coordonnée du temps investi ou dépensé.

On se perd dans des dédales, on y perd du temps, on effrite notre confiance en nos ressources de support. L’essor de nouvelles technologies concoure à ce que le temps numérique vienne troubler le temps humain et nous essouffle.

Le temps ne fait pas que s’accélérer, il se désorganise. Il est de plus en plus difficile de se synchroniser pour être vraiment ensemble.

Le règne de l’éphémère volatilise le moment présent, celui qui est à vivre et à saisir.

« Le temps fait partie de notre écosystème et l’homme constamment modifie cet écosystème ce qui l’a conduit à développer des ressources pour s’adapter au monde. Cependant nos capacités d’adaptation semblent aujourd’hui menacées ». *

Nous avons besoin de nous accorder un temps suffisant pour raisonner, réfléchir, construire ou trouver du sens pour avoir le sentiment que le temps ne fait pas que passer à vide mais qu’il est invitation à vivre, à construire, à être en relation avec autrui.

Y a-t-il quelque chose à rattraper tandis qu’il en est encore temps ?
Le Grand Horloger nous invite-t-il à des moments de rattrapage ?
Le temps Pascal peut en être un.
Se ralentir pour se sentir vivre et reprendre un certain contrôle sur le temps en l’investissant là où cela a un prix et un sens.

Seigneur, ouvre-nous ton chemin et invite-nous à y passer le temps nécessaire,

Ann Montreuil, Éditorialiste au Montmartre à Québec


*Delage, Michel (2020). « Le temps d’exister » Odile Jacob