2 août 2020 18e dimanche du temps ordinaire A – Matthieu 14, 13-21
” Vous tous qui avez soif, venez… Pourquoi dépenser votre argent pour ce qui ne nourrit pas, vous fatiguer pour ce qui ne rassasie pas ? »
Les quatre lectures d’aujourd’hui, – si on y inclut le psaume, – répètent à leur façon, un même message : Dieu n’arrive pas à se passer de nous.
L’invitation d’un Dieu-Amour
Le Dieu qui nous a créés connaît nos besoins : la soif, la faim. La nécessité de les satisfaire, d’abord au plan matériel, se comprend facilement. Mais ces besoins en cachent de plus profonds : la faim et la soif intérieures. De là les questions du prophète Isaïe :
« Vous tous qui avez soif, venez… Pourquoi dépenser votre argent pour ce qui ne nourrit pas, vous fatiguer pour ce qui ne rassasie pas ? »
Dieu invite : « venez ». Il veut étancher cette soif ; il offre d’apaiser cette faim. Il le fait savoir à un peuple qui revient d’exil, après avoir tant soupiré revenir dans ses terres et découragé par les difficultés qu’il y rencontre.
Les Juifs de retour d’exil avaient misé sur leur lieu d’origine. Ils découvrent que le retour sur leurs terres ne suffit pas. Par l’intermédiaire du prophète, Dieu les invite à se tourner vers lui.
« Prêtez l’oreille ! Venez à moi ! Écoutez et vous vivrez. »
Nous ne pouvons comparer notre confinement à un exil. Mais sa durée nous a fait soupirer revenir à la normale. L’allègement des mesures facilite à nouveau les relations que nous entretenions. D’en avoir été privés nous fait découvrir toute l’importance qu’ils ont et le bienfait de les avoir quand nous cerne la solitude. Toutes ces heures passées à réfléchir ont fait resurgir la question d’Isaïe : pourquoi « vous fatiguer pour ce qui ne rassasie pas ? »
En fait, avons-nous pu identifier plus clairement ce qui nous rassasie intérieurement ?
Au sortir de la pandémie, nous risquons de revenir à nos habitudes. Il ne faudrait pas à nouveau nous fatiguer pour ce qui ne rassasie pas. Isaïe rappelle à son peuple que Dieu ne l’oublie pas et l’invite à nouveau à se laisser guider. Dieu ne se résigne pas à nos ruptures d’alliance. Comme le chante le psaume : « Le Seigneur est tendresse et pitié. »
Sa Parole, si nous prenons le temps de l’accueillir, peut nous indiquer les sources qui peuvent étancher nos soifs et calmer nos faims intérieures.
Le souci de Jésus
En sa personne, Jésus incarne le souci de Dieu pour notre humanité.
« Je ne suis pas venu juger le monde, je suis venu sauver le monde. » Jn 12, 47 Tob
Il le démontre par son attention aux malades, aux pauvres, aux possédés. L’épisode la multiplication des pains en est un autre exemple. Il se produit immédiatement après la mort de Jean Baptiste, décapité sur un ordre d’Hérode. Jésus se retire alors dans un lieu désert pour échapper à l’hostilité du roi. Il recherche la solitude après l’exécution de son cousin Jean.
L’apprenant, les foules le rejoignent. À la vue de tous ces gens, l’évangéliste écrit : « Il fut pris de pitié pour eux parce qu’ils étaient comme des brebis qui n’ont pas de berger, et il se mit à leur enseigner beaucoup de choses. » Mc 6, 34
Devant cette foule qui le poursuit, Jésus oublie son propre besoin de paix et de solitude. Ces hommes et ces femmes sont attirés par la force de sa parole et par les guérisons qu’il opère. Alors Jésus choisit de combler cette faim spirituelle de la foule et Il leur enseigne « beaucoup de choses ».
Le récit de Matthieu souligne le rôle des apôtres ; ils ont perçu le besoin de la foule et ils le signalent à Jésus.
« L’endroit est désert et l’heure est déjà avancée. Renvoie donc la foule : qu’ils aillent dans les villages s’acheter de la nourriture ! »
La réponse de Jésus les prend au dépourvu :
« donnez-leur vous-même à manger. »
La foule était venue écouter Jésus. Elle ne demandait pas à manger. L’initiative vient de Jésus, par l’intermédiaire des apôtres. Ces derniers avouent leur impuissance à nourrir une telle foule. Jésus leur demande pourtant de partager le peu qu’ils ont. Avant de bénir les pains et les poissons, il lève les yeux vers le ciel, reconnaissant avoir besoin du Père pour accomplir son geste de miséricorde.
La mise en commun de leurs maigres ressources permet de rassasier la foule. Dans les mains de Jésus et puis celles des disciples, pains et poissons se multiplient et toute la foule mange à sa faim. Dans la mémoire des fidèles, les chiffres se sont sans doute gonflés, mais le souvenir d’avoir été rassasiés est demeuré. Il restait 12 corbeilles, symbole de la libéralité de Dieu qui surpasse nos besoins.
L’écoute de la Parole de Jésus aboutit au partage. Avec notre pauvreté, Jésus peut accomplir des merveilles. Les apôtres ont fait confiance et partagé le peu qu’ils avaient et Jésus a pu multiplier pains et poissons. La solidarité n’appauvrit pas.
Nos propres ressources demeurent limitées devant l’immensité des besoins autour de nous. Il n’y a pas que le pain qui se partage. En cette période de confinement, le temps devient précieux qui nous permet, par différents moyens, de rejoindre des personnes qui ont grand besoin d’attention, d’écoute, de reconnaissance, de présence, même virtuelle, etc… Pouvons-nous le partager ? Comme Jésus et les apôtres qui ont partagé ce qu’ils avaient par amour pour les autres.
L’amour indéracinable de Dieu pour nous
Paul a rencontré mille difficultés dans son ministère et subi la persécution : lapidation, bastonnade, flagellation, emprisonnements, trahisons, médisance, etc. Il a traversé ces épreuves, confiant que rien de tout cela ne pouvait le séparer de l’amour de Dieu.
« En tout cela nous sommes les grands vainqueurs grâce à celui qui nous a aimés. J’en ai la certitude : ni la mort ni la vie, ni les anges ni les principautés céleste, ni le présent ni l’avenir, … rien de pourra nous séparer de l’amour qui est dans le Christ Jésus Notre Seigneur. »
Dans le monde, les persécutions religieuses se sont multipliées. Récemment, les récits de possession ont refait surface. Retenons les mots de Paul et surtout son assurance : ni rien ni personne ne peut empêcher Dieu de nous aimer. Pas même le diable en personne. Dieu tient à nous. Nous ne pourrons jamais l’empêcher de nous aimer, même lorsque nous refusons son amour.
Dieu tient à chacun et chacune d’entre nous et nous occupons une place unique, irremplaçable dans son cœur.
Marcel Poirier, a.a.
Ma chair à manger