Quatorze jours! C’est si peu quand on pense à des vacances! Quatorze jours! C’est énorme quand il s’agit de confinement imposé lors d’une pandémie!
Dans mon éditorial précédant, j’ai invité au recueillement. Aujourd’hui, je vous convie à la patience. Pourquoi? Quand une situation pénible perdure, pour la traverser il faut s’ajuster à un rythme particulier et, comme dans tout exercice, cela exige de la patience. Jésus-Christ invite ses disciples à la patience d’une manière étonnante : « Il en est du règne de Dieu comme d’un homme qui jette le grain dans son champ : nuit et jour, qu’il dorme ou qu’il se lève, la semence germe et grandit ; il ne sait comment ». (Mc. 4, 27). Tout naturellement, il faut respecter les conditions qu’impose la vie : apprendre à respirer de façon à éviter l’essoufflement. Eh oui, lors d’entraînement physique nous maîtrisons notre respiration ; cela vaut aussi pour notre vie spirituelle.
Le dimanche des Rameaux nous introduit dans le mystère de la patience de Dieu en vue de vivre la Semaine Sainte. Comme les habitants de Jérusalem, nous accueillerons le Seigneur aux portes de notre cœur. Nous ne pourrons pas arborer les palmes selon nos gestes rituels habituels, mais nous pourrons lui ouvrir notre cœur en déposant à ses pieds les branches de l’action de grâce pour l’amour reçu. De même pouvons-nous confier au Seigneur le poids de notre anxiété, de nos incertitudes et de nos souffrances en cet épisode (passager) de la maladie. Cela implique de se poser, de respirer à fond, d’agir dans la paix là où nous sommes.
En ces jours-ci, plusieurs d’entre nous sont privés de l’Eucharistie et des célébrations communautaires. Permettez-moi de vous rappeler que jadis, saint Paul écrivait à la communauté de Corinthe: « Ne savez-vous pas que vous êtes le temple de Dieu, et que l’Esprit de Dieu habite en vous ? » (1 Co 3, 16). Et, parce que nous sommes les enfants bien-aimés de Dieu, « Dieu a envoyé dans nos cœurs l’Esprit de son Fils, lequel crie ABBA ! Père ! ». Avec confiance, retournons en nous, en cet espace sacré, et avec saint Augustin, dans ses Confessions, disons : « Mais toi (Dieu), tu étais plus intime que l’intime de moi-même, et plus élevé que les cimes de moi-même ». Entrons donc avec un cœur confiant dans ce mystère de Dieu patient et miséricordieux.
En célébrant les mystères de Pâques, nous tenons chacun et chacune de vous dans notre prière pour que les fruits de l’Eucharistie se répandent en abondance dans vos âmes. Être séparés de vous en ces jours Saints est aussi une épreuve pour nous. Sans minimiser cela, osons croire que, par la grâce de Dieu dans sa Résurrection, nous sommes liés par les liens invisibles de la grâce et de la bonté de Dieu. Là où nous sommes, respirons à pleins poumons pour ouvrir à Dieu l’espace de la grâce.
Édouard Shatov
Cieux déchirés et élection filiale