En ces jours de bouleversements sanitaires, éthiques, politiques, voire financiers, sociaux et en même temps, très personnels, nous assistons, je le crains, à la mise à l’épreuve de cette grande maxime connue et reconnue par toutes et tous : notre conduite à l’égard des autres doit être identique à notre conduite à l’égard de nous-même. Ou dit autrement « Ne fais pas à autrui ce que tu n’aimerais pas que l’on te fasse. » Cette maxime, c’est la Règle d’or, dont la formulation traverse la plupart des religions, philosophies ou cultures du monde. Et cela depuis des millénaires. Faut-il le redire, « depuis des millénaires » ! C’est dans sa fraîche simplicité, une sorte de précepte de réciprocité universelle, une barrière spirituelle qui se dresse par-delà les âges contre l’égoïsme, et contre celles et ceux qui pensent ne pouvoir réaliser pleinement leur liberté qu’en bafouant celle des autres.
Or voilà que nous assistons aujourd’hui à la plus grande barbarie de tous les temps : la victoire de l’égoïsme. Bon, nous savons, et l’Histoire nous le rappelle, que des ères de barbarie ont accompagné l’histoire de l’humanité. Mais, curieusement, et l’archéologie moderne nous le confirme, sans détruire la possibilité que sur ces temps de noirceur renaissent, refleurissent d’autres civilisations, d’autres temples, d’autres raffinements, d’autres forces appartenant à l’être humain.
Ce qui se passe sous nos yeux, aujourd’hui, est tout à fait différent : ce n’est pas la totalité des savoirs qui ont disparu, comme ce qui arrivait autrefois ; aujourd’hui c’est la totalité des valeurs qui font l’humanité elle-même, et qui font son habitat vivable, qui sont purement et simplement balayées. Balayées, il ne nous reste que l’égoïsme. L’égoïsme que nous érigeons comme seule « valeur » acceptable dans notre monde aseptisé et « abstraitisé » par la science souveraine et par le rejet fanatique du sacré, de la beauté, de la grandeur. Témoins, le vide et l’insignifiance des programmes scolaires, la puissance des médias à promouvoir le « trash » et à avilir les langues « natales ».
Témoin aussi, le sort que l’on fait, chez nous à tout le moins*, aux consignes de prudence recommandée devant la recrudescence apparente des virulences du Covid-19. « Porter un protège-visage, moi ? » « Rester chez moi et éviter les rassemblements amicaux, moi ? Fuir les foules, moi ? » « Tout cela pour protéger la vie des autres ? ? » « Ce serait pour protéger ma vie, encore que… ma vie m’appartient, ne vous mêlez pas de « ma » liberté. » « Moi », « ma », voilà l’horizon spirituel humain qui en prend pour son rhume. Et sans cet horizon qui se métamorphose sous nos yeux en égoïsme, que reste-t-il ? Il reste, la barbarie et le barbare. Lo siento.
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*Et pas que chez nous.
MONIQUE LORTIE
lortie.monique@gmail.com
Qu’attendons-nous ?