16 octobre 2022 29e dimanche du temps ordinaire, année C – Luc 18, 1-8
« Faut-il renoncer à l’amour et à la justice face aux obstacles de la vie, ou faut-il plutôt persévérer, affronter les difficultés avec courage ? » – voilà la question de l’évangéliste Luc au début du dix-huitième chapitre de son Évangile.
La Reconnaissance du Réel
L’Amour et la Justice – deux réalités liées à jamais quand on croit en Dieu, à soi-même et aux autres. Ce n’est peut-être pas par hasard si Jésus rappelle cela à ses disciples et à nous à travers eux. Les disciples de Jésus croient qu’à la fin du monde Dieu règnera enfin sur toute la création et que le Fils de l’homme règnera avec lui. Jésus se présente souvent dans les évangiles comme le Fils de l’homme, figure tirée du livre de Daniel. On est donc dans une atmosphère de fin du monde, mais cela ne devrait pas nous faire peur. Le thème de la fin du monde et du jugement est une assurance pour les croyants que l’amour et la justice auront enfin le dernier mot. En regardant les injustices et les manques d’amour dans notre quotidien cela est difficile de croire de temps à autre. À force de subir des injustices, ou juste de voir les autres êtres humains les subir à l’infini, le danger qui nous guette, c’est de devenir cyniques, de nous décourager et de ne plus croire que l’amour est possible. C’est contre cette tentation que Jésus nous met en garde.
La Persévérance Courageuse
Jésus nous raconte alors une histoire : l’histoire d’une veuve qui poursuit le juge de ses réclamations jusqu’à ce qu’elle obtienne ce qu’elle attend. Pourtant elle aurait toutes les raisons de se décourager : sa cause semble bien perdue d’avance, puisqu’elle a eu la malchance de tomber sur un juge qui se moque éperdument de la justice. Un juge qui se moque même de Dieu, ce qui veut dire qu’il n’a aucune référence absolue dans la vie. En effet, il y a de quoi se décourager. Mais elle s’obstine parce que sa cause est juste, elle n’en doute pas un instant. C’est elle que Jésus nous donne en exemple. L’exemple de reconnaissance de sa condition : si elle importune le juge, c’est parce qu’elle est dans le besoin. La première condition pour participer au Royaume de Dieu, c’est de reconnaître notre condition telle qu’elle est, reconnaître nos manques et notre pauvreté. Une autre condition est la persévérance : dans notre attente du Royaume nous sommes invités à être aussi tenaces que cette veuve obstinée. Notre cause est encore plus juste que celle de la veuve puisque c’est la cause même de Dieu. La prière c’est juste cela : reconnaître notre condition et tenir à l’amour et à la justice.
La Force Inépuisable
Nous sommes invités à prier sans cesse, sans baisser les bras. Comment avoir une telle force ? Où faut-il la puiser ? La réponse peut être plus simple qu’on l’imagine. Il faut juste croire que Dieu veut le salut de son peuple, que Dieu veut le salut de l’humanité. Juste cela ! Nous sommes invités à croire que Dieu accompagne l’humanité à travers toutes les difficultés de la vie. Et les croyants sont invités à faire de même. Les mains levées pour la prière sont le symbole de toute la prière humaine. Elles disent la confiance, la certitude du croyant que Dieu ne l’abandonne jamais. Dans la lettre à Timothée, Paul nous dit : « Je recommande que partout les hommes prient les mains levées vers le ciel… » (1 Tm 2, 8). C’est Dieu qui agit : ces mains levées le disent bien puisqu’elles restent immobiles et qu’elles semblent renvoyer la responsabilité vers le ciel ; mais en même temps, elles sont levées : le croyant ne baisse pas les bras. Les mains du combattant, les mains levées du priant sont notre petite participation à l’œuvre de Dieu.
Mais il arrive que le priant, exténué, physiquement ou moralement, n’ait plus la force de « lever les mains » vers le ciel : alors il est bon de trouver des frères et sœurs pour soutenir nos mains défaillantes ; normalement, c’est le rôle de nos communautés. Cette entraide mutuelle est un signe que croire à l’impossible est possible, et que notre espérance ne nous trompe pas.
Édouard Shatov, assomptionniste