Restons, si vous le voulez bien dans le thème de toutes les rentrées, les livres. Aujourd’hui, je me permettrai d’attirer notre attention sur un livre tout à fait surprenant, tout à fait « politically incorrect », au titre un tantinet iconoclaste qui va comme suit : Délivrez-nous du bien (Paris, Éditions de l’Observatoire, 2018). Deux journalistes français animés par la traque au dérapage social, à la tyrannie des minorités, à la contrefaçon du langage, à la réécriture de l’histoire, signent cette petite montée de lait, ou cette grande indignation, vous jugerez, Natacha Polony et Jean-Michel Quatrepoint.
« Quelque chose surgit au détour d’une conversation, au moment où, pris dans l’élan des échanges collectifs, on veut lancer un bon mot, ou bien lors de ces discussions banales autour d’un café. Tout à coup, un regard, un mot d’un des protagonistes, qui vient de couper net le flux un peu trop bon enfant. On comprend à l’instant qu’on a prononcé cette phrase, il y a peu anodine, mais qui relève aujourd’hui de l’offense ou du crime. On se sent coupable. Coupable d’aimer la côte de bœuf, coupable d’avoir blagué sur les femmes, coupable d’avoir laissé entendre qu’on ne considérait pas l’homoparentalité comme parfaitement équivalente à une structure familiale normale. D’ailleurs non, pas ‘‘normale’’. C’est justement ça qui est criminel : considérer qu’il puisse y avoir une ‘‘norme’’. Mais alors, comment faut-il dire ? On ne sait plus, on s’enfonce. »
Et finalement, « on se tait », concluent les auteurs. Pourtant, on ne se sent pas une mauvaise personne. Mais justement, ce sont, aujourd’hui, les « bonnes personnes » qui perpétuent sans en avoir conscience la culture criminelle de domination. Ce sont elles, ces bonnes gens qui doivent être d’urgence rééduquées.
Une nouvelle religion est en train de naître : le minoritarisme. Dont les commandements sont implacables : tu ne dois pas dévier sinon tu connaîtras l’enfer sur terre.
– Au nom du Bien, tu te repentiras : d’avoir eu des ancêtres esclavagistes, d’avoir dans ton enfance passé l’Halloween en te déguisant en Arlequin ou en Shéhérazade, ou pire en cowboy et en indien. Et surtout d’être né homme et blanc…
– Au nom du Bien, l’autocensure tu pratiqueras : suis-je raciste au fond ? ai-je eu un début d’intérêt pour ma collègue au travail ? est-ce que je cède parfois à la tentation de critiquer l’islamisme radical ? …
– Au nom du Bien, l’orthographe tu modifieras : le « il », le « elle » sont délicats à utiliser. Père et mère deviennent 1e parent, 2e parent. L’« Homme » de la philosophie millénaire devient l’être humain, ou mieux, l’homme et la femme, et le mot « fierté » ne désigne plus que le petit monde des LGBTQ…
– Au nom du Bien, on va vous rééduquer : on va vous nettoyer des habitudes scandaleuses que vous avez acquises : être seul-seule (!) dans votre auto, fumer, faire de l’humour, corriger vos enfants, manger les animaux et vous couvrir avec leur laine, etc…
Et cætera…
Le livre Délivrez-nous du Bien montre avec finesse et lucidité qu’« au nom du Bien », tout peut basculer, avec notre complicité, du jour au lendemain… si ce n’est déjà fait. À lire jusqu’au dernier chapitre, au nom du Bien ! Orwellien !
P.S. Nous apprenons aux dernières nouvelles que Google modifiait son émoticône ‘Salade’ en en retirant les rondelles d’œufs. « Cela en fait une salade végane, plus inclusive » a tweeté la responsable du design des émoticônes.
Monique Lortie
Pour être le regard de Dieu