Billet du dimanche, 19.03.2023
Monique Lortie, M.A. phi.
L’homme ne peut pas davantage inventer le bien et de nouvelles valeurs « qu’il ne peut placer un nouveau soleil dans le ciel ».
Cette phrase à la fois surprenante et forte est tirée d’un livre de mon nouvel ami, C.S, Lewis.
Je dis « mon ami » parce que toute personne qui fait preuve de discernement est mon ami. Le livre de Lewis est un des rares aujourd’hui à dénoncer la tendance forte à inventer de nouvelles valeurs… au nom de l’évolution, au nom du Progrès. Au motif que « c’est la mode aujourd’hui » et qu’on ne peut rester en arrière.
L’argument qu’« on ne peut rester en arrière », sorti de la science de l’évolution biologique est un trompe-l’œil : la dignité humaine ne tient pas à l’hypothèse scientifique de l’évolution darwinienne.
On aura sans doute remarqué que se creuse ainsi un fossé entre la vieille génération et les nouvelles. Papy et mamie adorent telle musique, la grégorienne, par exemple ; leurs enfants et leurs petits-enfants sont agacés par la « vieille » musique. Ils sont modernes et semblent avoir perdu tout sens du sens. La musique est la musique et n’est le signe d’aucune valeur.
On rencontre le même fossé dans le monde de la mode. Combien de nous avons remarqué que le vêtement d’aujourd’hui a des impératifs étonnants : jeans savamment troués, t-shirts laissant voir le ventre de la jeune demoiselle, voire de la toute jeune fille que sa mère encourage à se dénuder puisque « c’est la mode d’aujourd’hui ». Sans parler des shorts pour l’été qui se portent maintenant de plus en plus comme des « bobettes ». Que voulez-vous, on ne peut être contre, c’est la mode aujourd’hui.
À la question qu’on a envie de poser : est-ce que réellement vous trouvez cela beau ? La réponse est aussi étonnante que subjective : le beau, maintenant, n’est pas important, ce qui compte, c’est l’audace d’exhiber le corps de la jeune fille, de la jeune femme. Pourquoi ? Il n’y a plus de Pour Quoi. Ce qui compte, c’est le sentiment de toute-puissance que ressentent ces femmes, ces jeunes filles, ces fillettes.
C’est ainsi que la valeur perd de son importance, pourrions-nous penser. Et pourtant, il n’en est rien : la valeur a dégringolé du noble, objectif, pour aboutir au pur subjectif. On ne veut plus du noble abstrait, je veux m’exprimer, moi ! C’est ma vérité. Je suis la mesure de toutes choses.
Or comme des « je » il y en a des tas, alors nous entrons dans une ère de cacophonie. Quoique…
Aussi étonnant que cela puisse paraître, ces nouvelles valeurs toutes subjectives qu’elles soient se muent en dogme. C’est une religion. Et à l’instar de toute religion : « hors de l’église, point de salut ». Refusez, ou négligez d’entrer dans cette religion, vous vous retrouvez au ban de la société, vous devenez de trop.
Une chose me taraude pourtant : comment se fait-il que des personnes plus âgées, celles qui ont connu la valeur de la valeur, celles qui ont appris que la dignité humaine est concrète et réelle, que cette dignité fait de nous des animaux divins…
Comment se fait-il – et cela me confond – que des personnes plus âgées que les jeunes générations abdiquent leurs valeurs humaines pour résoudre dans le « c’est la mode », « c’est le progrès », « c’est l’évolution » ?
C’est ma question de la semaine.