« Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés », dit la fable*.
Fatigués de n’entendre parler que de la Covid-19 ? Exaspérés peut-être aussi, non ? Et le Temps des Fêtes qui approche… Mais c’est peu dire « qui approche » ; il faudrait dire qui, s’approchant, nous enserre non seulement l’esprit et le cœur, mais le corps tout entier. C’est l’angoisse ; une angoisse sourde, un étau.
Il existe pourtant un remède très simple à cette paralysie, je vous mets au défi de l’essayer : il faut lever les bras en l’air comme pour s’étirer après le sommeil et… bâiller. Bailler énergiquement. Étonnant, dirons-nous, si l’on se souvient que ce simple mouvement des bras en l’air est le même que celui du guerrier pour signifier sa capitulation ! En réalité, ce même mouvement dans le cas de l’angoisse signifie pour le corps que la pensée capitule. De plus, si lever les bras en l’air favorise le bâillement énergique, cela a aussi pour effet de libérer physiologiquement le cœur que les soucis ont serré littéralement. Libération aussi de la respiration.
Nous ne parlons pas ici des étonnants soucis rotatifs que l’imagination et la mémoire fournissent à journée longue aux esprits inoccupés et imprudents ; non, il s’agit plutôt de ces soucis qui viennent de l’attente, la sœur de l’impatience, elle-même cousine proche de la colère. Une colère qui bientôt se retourne contre nous, et nous voilà pris dans ses filets… qui serrent le cœur jusqu’à l’angoisse (angst, resserrement). Or n’est-ce pas que confinés comme nous le sommes, nous éprouvons toutes et tous cette attente insensée et vaine que cela finisse enfin ? N’est-ce pas, alors, qu’il ne serait pas faux de prétendre que seule la pratique du bâillement énergique pourrait nous délivrer ? En réalité, quoi d’autre ? Se mordre la langue, fait mal, crier nous épuise, pleurer nous brûle les yeux ; alors que bailler est sans douleur !
On se demanderait toutefois comment le bâillement, qui est, on le sait, contagieux comme une maladie, pourrait nous soulager de la crainte contagieuse de la Covid-19, elle-même une maladie contagieuse… Bâiller, nous dit le philosophe Alain, est, à toute fin pratique, comme le signal pour les inquiétudes, les désespérances, les soucis de « rompre les rangs ». Voyez le chien qui bâille au coin du feu et qui signale à sa façon de renvoyer nos soucis à demain. Dans le bâillement profond, toutes les pensées sont mises en fuite, ajoute notre philosophe. Dans le bâillement, le sommeil qui est annoncé, ou tout simplement imité, les embrume et bientôt les chasse.
Comme quoi, il faut peut-être reconnaître que ce sont bien souvent nos pensées qui sont responsables de nos redoutables anxiétés – et qui sont même pour beaucoup dans plusieurs de nos maladies. Ainsi ce sont nos pensées qui sont contagieuses, au fond. Bien plus sans doute, j’ose le dire, que l’invisible Covid-19.
* Jean de La Fontaine, Les animaux malades de la peste.
MONIQUE LORTIE
lortie.monique@gmail.com
Pour les personnes que l’angoisse, la tristesse, la colère submergent, vous devez savoir aussi que la philo-thérapie que je pratique est d’un étonnant secours. Au besoin, téléphonez-moi pour un rendez-vous au 418 933-9267. Le Temps des Fêtes en Confinement rouge peut se révéler extrêmement pénible, appelez-moi. Je suis disponible même pendant le temps des Fêtes alors que les désarrois sont souvent plus brûlants.
Au-delà de toute Frontière