3 octobre 2021 27e dimanche du temps ordinaire, année B – Marc 10, 2-16
Lectures de ce jour
Une accusation a déjà été lancée contre la pensée judéo-chrétienne comme étant en faveur de l’exploitation sauvage de la nature en présentant dans le récit de la Genèse l’être humain comme dominateur et destructeur (Gn 1,28). Le pape François répond à cette accusation dans son encyclique Laudato si’ en invitant de lire les textes bibliques dans leur contexte, avec une herméneutique adéquate et de se souvenir qu’ils nous invitent à « cultiver et garder » le jardin du monde (Gn 2,15) (Laudato si’, no 67).
De l’inégalité à l’égalité homme-femme
À première vue, l’évangile et la première lecture de ce dimanche donnent l’impression de favoriser la domination sociale de l’homme sur la femme dont on pourrait encore accuser la pensée judéo-chrétienne. Le premier, c’est-à-dire l’homme, est inégalement le seul ayant droit de répudier l’autre selon une norme en Deutéronome 24,1 à laquelle les pharisiens se réfèrent. Quand Jésus déjoue le piège de ces derniers, il semble admettre l’inégalité entre l’homme et la femme en mentionnant un extrait de Genèse 2,18-24 où il est dit que la femme a été tirée de l’homme.
À partir de l’invitation du pape, je remarque plutôt dans l’évangile que Jésus montre un effort d’égalité entre l’homme et la femme à construire dans la vision de Dieu. Il démasque la malice des pharisiens qui prétendent le piéger en abordant le divorce sous le seul angle juridique, au bénéfice de seul l’homme (masculin) et en se référant à un seul article de la Torah (Dt 24,1). Jésus ne se complait pas dans leur jeu de jalousie et de misogynie, ces hommes au cœur endurci. Il aurait pu les renvoyer à une seule considération théologique de la création de l’homme (ish/ masculin) puis de la femme (ishsha) tirée de l’homme comme étant en vue du partenariat des deux. S’arrêter à ce récit de Genèse 2,18-24 serait, à ses yeux, consacrer comme font les pharisiens l’inégalité entre l’homme créé en premier et la femme en second comme aide, ou mieux, correspondante au sens de coresponsable. Il met de l’avant l’autre vision théologique de la création en Genèse 1,27 en affirmant : « Au commencement de la création, Dieu les fit homme et femme. » Il y a certainement un peu de marque de la culture patriarcale dans le langage de Jésus, mais il poursuit vers l’égalité homme-femme poussée plus loin en citant même le récit le plus patriarcal : « À cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme, et tous deux deviendront une seule chair » (Gn 2,24).
Un pas de plus vers l’égalité homme-femme
Ce déplacement de l’homme vers la femme, sans être uniquement une matrilocalité et un renversement de pouvoir, est un pas de plus vers l’égalité homme-femme en vue de l’unité en Dieu, jusqu’à celle de chair comprenant l’histoire. En d’autres termes, l’homme et la femme sont appelés par Dieu, non pas à se séparer, mais à se rencontrer d’égal à égale. Cette rencontre dit d’une certaine façon en elle-même non à la séparation allant jusqu’au divorce initié dorénavant aussi bien par la femme que par l’homme, non à la domination de l’un par l’autre dans l’espace tant public que privé, non à toute forme de violence traduisant cette domination ; mais oui à l’égalité dans divers domaines de la vie (notamment affectif et familial où la nouvelle liaison devient adultère pour l’un comme pour l’autre), oui à la tendresse jusque dans ce qui est le plus intime. C’est un appel à l’humilité comme celle de Jésus « qui a été abaissé un peu au-dessous des anges » (He 2,9) adressé à nous ses disciples ; un appel à quitter nos arrogances symbolisées auparavant par le masculin pour vivre avec la tendresse qui a été associée à la femme ; notre ressemblance aux enfants venant à Jésus par laquelle nous appartenons au royaume de Dieu.
Dans notre prière de ce dimanche, rendons grâce à Dieu pour de milliers de pas que nombreuses personnes ont effectués dans l’égalité homme-femme notamment au Québec où elle est inscrite dans la Charte des droits et libertés de la personne, pour celles qui la construisent au jour le jour ainsi que pour celles qui l’ont vécue jusqu’au bout ; une prière aussi pour celles qui vont s’y engager. Confions également à Dieu toutes les personnes pour lesquelles cette égalité a été difficile à vivre. Certaines ont pu trouver des ressources en Église, dans la justice, devant Dieu pour leur réconciliation ou pour la nullité de leur mariage qui a été estimé et déclaré n’avoir vraiment jamais eu lieu. Ainsi, elles avaient la possibilité d’avoir l’union matrimoniale heureuse par après. D’autres continuent d’être victimes des inégalités et parfois en paient de leur vie. Que dire du ministère presbytéral réservé encore aux hommes, tendres soient-ils ? Puisse Dieu nous aider à avancer vers plus d’égalité homme-femme et surtout vers l’union parfaite en lui.
Sadiki Kambale Kyavumba, assomptionniste
L’obole de la pauvre veuve