Il y a peu de temps, je voyageais à l’étranger et je me suis retrouvé de nouveau à l’aérogare en train d’attendre : à l’entrée, au poste de sécurité, au comptoir des billets, devant l’agent de l’immigration… avant d’atteindre la salle d’attente prêt pour l’embarquement. J’ai beaucoup de temps pour observer les autres personnes qui attendent elles aussi. Certains sont là depuis assez longtemps et se sont endormi. D’autres prennent soin de leurs gamins perturbés par un lever hâtif. Voilà un jeune couple occupé chacun à son téléphone portable pour avertir leurs amis des dernières nouvelles. Et moi, je regarde ma montre qui indique que je puis continuer de lire mon roman pendant encore deux heures…
Il est intéressant de constater ce que chacun fait durant ce temps d’attente. Quelle perte de temps parfois! De plus en plus de gens voyagent avec leur portable ; ils continuent de travailler, regardent un film ou s’amusent à jouer un solitaire. À coup sûr, peu de personnes ne veulent entreprendre une conversation avec son voisin même s’ils voyageront ensemble pendant quelques heures avant d’atteindre leur commune destination. Seul un problème de moteur à bord pourra rapprocher tout ce bon monde. Mais pour le moment, ils aiguisent leur patience et espèrent que leur vol n’aura pas de retard. Enfin, une douce voix féminine se fait entendre au haut-parleur : « Nous sommes maintenant prêts pour l’embarquement! » Tous se précipitent pour faire une longue queue d’attente, comme s’il n’y aurait pas assez de sièges dans l’avion.
Nous sommes en pleine saison pascale et nous avons célébré avec éclat la résurrection du Seigneur. C’est peut-être un bon temps pour méditer sur la qualité de notre attente de son retour dans la gloire. Au tout début, certains chrétiens croyaient que le retour du Seigneur serait imminent, qu’ils le reverraient de leur vivant. Ils se croisaient les bras en l’attendant. Ainsi, Paul écrit dans sa lettre aux Thessaloniciens : « Nous avons entendu dire que certains parmi vous étaient afférés à ne rien faire… Nous leur demandons dans le Seigneur de manger le pain qu’ils auront gagné et de travailler en toute quiétude. » (2 Thes 3, 10-13) Ne faudrait-il pas regarder d’un peu plus près à la manière dont nous attendons le retour du Seigneur ?
J’ai toujours pensé que notre vie spirituelle ressemble à un voyage. Nous connaissons des moments d’exaltation alors que la présence du Seigneur est réconfortante, que les pages d’Évangile nous parlent clairement, que les temps de silence ou de prière sont apaisants et que notre désir de nous engager au service des frères est stimulant. Mais ce n’est pas toujours le cas. Nous avons aussi des temps de sécheresse, de solitude et de repli sur soi devant les difficultés qui encombrent nos vies d’homme et de femme. Avec le Psalmiste, nous avons le goût de crier : « Où es-tu, Seigneur ? Vas-tu m’abandonner à mon désespoir ? » Le Seigneur n’est pas absent. C’est plutôt moi qui suis sourd à sa parole, trop occupé que je suis à ces babioles qui encombrent ma vie. Je dois me recentrer sur l’essentiel, ce qui compte vraiment dans la vie. C’est à ce moment qu’il faut relire l’histoire de sa vie, rappeler à sa mémoire ces personnes qui ont croisé ma route et m’ont aidé à rencontrer le Seigneur en profondeur et approfondir le désir de servir mes frères.
Tout en attendant, je puis être très occupé aussi.
Père Gilles Blouin a.a.
L’indifférence